đ€ Le festival de Cannes a fermĂ© ses portes dimanche dernier et câest lâoccasion pour nous de revenir sur une prise de parole qui a marquĂ© ce lieu, il y a 30 ans dĂ©jĂ .
Bon en arriĂšre donc.
1987, Festival de Cannes. La Palme dâor est attribuĂ©e Ă Sous le soleil de Satan de Maurice Pialat.
Au moment de la remise du prix, la salle du Palais des Festivals explose. Pas en applaudissementsâŠ
Non. Les huĂ©es tonnent et les sifflets retentissent au moment oĂč le rĂ©alisateur monte sur la scĂšne.
Le film est austĂšre, certes, dĂ©rangeant, mais câest un grand film.
Pialat, pourtant honoré par le jury mais hué par la foule en furie, monte sur scÚne dans un silence tendu.
Il lĂšve le poing et lance devant cette foule haineuseâŻ:
đ « Si vous ne mâaimez pas, je peux vous dire que je ne vous aime pas non plus. »
Cette phrase, devenue culte, nâa rien dâune provocation gratuite. Câest une rĂ©ponse dâhomme libre, Ă la maniĂšre du personnage incarnĂ© par Jean Gabin dans Le PrĂ©sident, qui assĂšne ses vĂ©ritĂ©s Ă la tribune sans se soucier des convenances. Chez Pialat, la parole nâest pas lĂ pour sĂ©duire, mais pour affirmer une vision. Et tant pis si ça grince.
Parler sous les huĂ©es, câest ça : tenir sans trembler, mĂȘme lorsque lâambiance devient hostile. Câest prĂ©fĂ©rer lâauthenticitĂ© au confort. Pialat nâa pas cherchĂ© Ă arrondir les angles. Il a fait face.
Dans une Ă©poque qui aime les discours calibrĂ©s, cotonneux, prudents, cette scĂšne de Cannes rĂ©sonne comme un rappel essentiel : une prise de parole forte nâest pas toujours une parole aimĂ©e.